Petite histoire de l’elfe
J’avais à peine 12 ans lorsque mes
parents m’ont fait la joie de m’emmener faire du cabotage avec leurs amis sur de
petits canoës canadiens à voile le long de la côte sauvage à l’ouest de la
Corse. Depuis cette époque, j’ai toujours aimé l’eau, le canoë…. et la Corse.
A
l’époque, les règlements concernant la sécurité étaient pratiquement
inexistants et à la belle saison, de telles expéditions étaient relativement
fréquentes en méditerranée lorsque le temps le permettait. C’est, assis
confortablement à l’avant du canoë en tant que 3ème équipier dans un canoë
normalement conçu pour 2 personnes, que je lisais paraît-il ‘’Tintin’’ en me
faisant tout petit et bien sage. Inconscience de la jeunesse! 10 ans plus tard je suis retourné en Corse
avec des amis faire du canoë, mais cette fois sur les beaux torrents corses
complètement inconnus à l’époque tels que le Tavignano le Golo, le Taravo.
J’utilisais encore le canoë en bois construit par mon père. Nous lui avions
adjoint un pontage en toile étanche évitant les entrées d’eau, car, au début
du printemps, ces torrents sont tumultueux et les chutes nombreuses. |
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Est-ce tous ces vieux
souvenirs ou le goût de l’aventure qui a motivé ma détermination ? Toujours
est-il qu’à 58 ans, lorsque la Société OILGEAR m’a proposée après une vingtaine
d’années de bons et loyaux services de quitter mes activités professionnelles,
j’ai pris la décision de concevoir et de construire mon bateau. Cette
initiative manquait un peu d’originalité mais je ne voulais pas rester
inactif et je me sentais encore en bonne forme physique et intellectuelle. Sous
l’impulsion d’un vieil ami canoéiste, l’étude se porta à l’origine vers un
petit trimaran de conception modulaire. Il devait être facilement démontable,
transportable derrière une voiture, orienté vers la promenade et le cabotage.. Il fut aussi décrété d’utiliser comme coque centrale un
canoë fermé en stratifié verre-résine tels ceux utilisés aux championnats du
monde de canoë kayak. Concernant la voile, le choix se porta vers une voile au
tiers moins performante certes mais pouvant être affalée facilement, améliorant
ainsi la sécurité en cas de coup de vent. Après réflexion on l’appela
"l’elfe" en mémoire à un bon
génie scandinave symbolisant les forces de la nature. Lorsque
l’on a de jeunes frères ayant assumés des responsabilités dans une école de
voile aussi prestigieuse que les Glénans, que l’on a passé sa vie dans le
domaine scientifique, la mécanique des fluides, la CAO et l’esprit un peu
chercheur, il est difficile de résister à l’envie d’explorer le domaine du fun
et de la vitesse. Pour la version
sportive de l’elfe avec les foils,
marketing oblige, mon frère René intervient, ce sera le Speed fun
La question : <<Maman les p'tits bateaux qui vont sur
l’eau ont-ils des ailes ?>> pris soudain
tout son sens et il fut décidé d’y répondre oui ! Après une étude approfondie basée sur
l’examen de nombreux articles techniques concernant les foils à la nouvelle
bibliothèque nationale François Mitterrand, et les essais relativement
satisfaisants d’une petite maquette au 1/5, nous décidâmes avec mon ami
Jacques, de construire une première version échelle 1 de l’Elfe utilisant des
foils obliques dit de première génération. Malheureusement force fut de
constater que l’utilisation de ces foils nuisait sérieusement à l’esprit
‘’promenade’’ de l’embarcation et compliquait trop le démontage et le
remontage.
Il apparut aussi aux essais que les flotteurs
n’étaient pas assez volumineux et il fallut se résoudre, malgré la difficulté
d’asservir l’embarcation en hauteur, de passer aux foils dit de 2ème
génération, puis dessiner, et construire, de nouveaux flotteurs plus gros.
C’est cette dernière conception qui, après homologation en bonne et due forme
au centre de sécurité des navires, et essais sur le lac Léman à Lausanne a
été utilisée avec mes fils lors du cabotage sur les côtes Corse pendant l’été
2001. Dans
la piscine de Jacques à Clermont Ferrand
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C’est ainsi
que nous nous sommes retrouvés par une belle matinée du mois de juin 2001 sur
une plage au fond de la baie d’Ajaccio en train d ‘assembler l’elfe en essayant
de ne rien oublier d’important pour notre petite expédition de 15 jours. La
sortie du golfe d’Ajaccio, effectuée à la pagaie par calme plat, face à un
magnifique soleil couchant a été un peu
longue et tardive, mais sitôt passé les îles sanguinaires, j’ai pu constater
avec beaucoup de joie que cette côte était restée telle qu’elle était 50 ans
plus tôt.
L’utilisation
d’une embarcation prototype pour longer une côte aussi sauvage ainsi que le
mauvais temps qui a sévit à deux reprises pendant notre expédition ont mis en
évidence l’aspect perfectible de cette réalisation. Il est déjà très difficile
de concevoir une embarcation sur des principes nouveaux, mais quand de plus le
budget est limité et que l’on cherche à concilier le cabotage itinérant avec la
vitesse et le fun……. Afin d’améliorer le passage dans les vagues et mieux loger les bagages nous aurions préférés
une coque centrale plus volumineuse ou nous aurions été plus libres de nos
mouvements. D’autant qu’il était impossible de mettre nos bagages les plus
encombrants dans les flotteurs en raison d’une conception en contreplaqué
marine moins coûteuse avec nervures cloisonnant l’intérieur du flotteur.
Nous avons
eu souvent le vent de face, et afin de mieux remonter au vent nous aurions souhaités
une voile plus performante que la voile au tiers. Ce n’est pas mon équipière
Angie ou mon fils Jean-Luc qui me contredira sur ce point. A notre décharge
il faut dire que nous avons souvent eux du mauvais temps avec une houle
résiduelle de 3 à 4m et des vents parfois supérieurs à force 4. Malgré ses imperfections l’elfe a ‘’pratiquement’’ tenu ses engagements. Je
dis bien ‘’pratiquement’’ car le cahier des charges initial regroupant les
fonctionnalités du Speed fun était
probablement trop exigeant et mon amour pour le canoë immodéré. L’asservissement
en hauteur indispensable avec les foils dit de 2ème génération
nous a entraîné par simplicité mécanique dans une
solution ou les flotteurs sont libres en rotation par rapport au tube de
liaison. Cette solution n’est pas remise en cause, mais quand le flotteur au
vent se retourne… comme le disait mon frère Pierre…. <<
C’est la mer qui corrige les devoirs >>. |
Essais en
mer avec la grande voile dans le
Languedoc Roussillon. |
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5 jours
après avoir quitté Girolata l’elfe sombrait, ou presque, au large la baie d’Elbo ! Il faut dire que le souvenir que j’avais de la marine d’Elbo était si fort que je n’ai pu m’empêcher d’accélérer
l’allure de l’elfe en arrivant en vue de la plage. Dix jours plus tard je
faisais une ballade dans la région mais à pied, c’est plus sûre…. Nous avons
pris le GR surplombant la baie d'Elbo et descendant plein sud vers Girolata, mais il y avait du brouillard nous n'avons pas
pu revoir le lieu de nos "exploits". Balendard L’elfe Iv en carbone kevlar ? |
Le travail à Clermont Ferrand
Foils avants 1ère
génération, préparation des profils
et usinage de la face d’appui avant
stratification
Chariot style trombone à
coulisse pour usinage d’un hyperboloïde de révolution (bravo Jacques)
Collage des 1er
flotteurs
Un peu de technique
Aquarelle
Michel Copin
Aquarelle Michel Copin