La production d'énergie

Les Lutins thermiques ont récemment demandés à Balendard, citoyen lambda, ce qu’il pensait de cette phrase souvent prononcée : « L’énergie est notre avenir ».

Tribune libre

Voilà la nature de leur conversation :

Balendard

Selon moi cette phrase est lourde de sens. Lourde de sens quant à la qualité de cet avenir. Au moment où  l’énergie est au cœur de nos préoccupations environnementales, nous devrions selon moi nous interroger sur le bien-fondé de continuer à utiliser la combustion des produits fossiles dits "non renouvelables" tels que le charbon, le pétrole ou le gaz pour produire l’énergie indispensable à notre confort quotidien. On s’accorde en effet à penser que ces produits génèrent des gaz nocifs nuisibles à notre environnement 1), qu’ils sont sales ou dangereux, difficiles à transporter, qu’ils deviennent petit à petit plus rares et donc plus chères, ce qui diminue de ce fait notre pouvoir d’achat. Il est de plus légitime que beaucoup d'entre nous s'inquiètent des déchets radioactifs et de la complexité des dispositifs de sécurité des centrales nucléaires. Alors qu’une énergie propre et sûre se trouve au-dessus de nos têtes et sous nos pieds, pouvez-vous me dire la raison pour laquelle nous ne les avons pas encore totalement abandonnés ?

Les Lutins thermiques

Ce retard n’est pas dû à la lenteur des progrès de la science et il n’est pas question ici de reprocher à un chercheur de ne pas trouver. Il n’est pas dû non plus à la difficulté de trouver des solutions nouvelles. Rien de tout cela. En fait la réponse à votre question tient en deux mots : L’argent et le profit. En raison de la masse monétaire considérable engendrée par la commercialisation des combustibles fossiles, la guerre des énergies continue trop longtemps au prix d'une atteinte à l'environnement. Les profits engendrés par leurs ventes au particulier, la fiscalité appliquée sur ces produits est telle que l’équilibre du budget national en dépend. A force d’attendre nous sommes devenus tellement dépendants financièrement de ces produits que nous ne pourrons plus les abandonner brutalement. Pour cette raison, la mutation vers les énergies renouvelables, par nature moins polluantes, ne pourra se faire maintenant que progressivement.

Balendard

Ne pensez-vous pas que notre seule chance de sortir de cette terrible impasse est de profiter de la complémentarité des techniques et des fluides?

Les Lutins thermiques

Oui, c’est en partie exact mais ne perdez pas de vue que les techniques telles que les pompes à chaleur et les voitures électriques hybrides sont maintenant suffisamment abouties et vont évoluer assez rapidement vers leur version définitive en privilégiant le fluide le plus économique pour l’utilisateur. Notre dépendance à l'or noir et ses dérivées est toutefois encore telle que c'est peut-être une fiscalité encore accrue sur ces mêmes produits qui financeront les investissements lourds qui nous permettront de sortir de l'ornière. Il ne faut pas craindre que la dépendance de l'homme aux énergies fossiles ne soit encore aggravée par cette fiscalité que beaucoup d’entre nous jugent excessive. L'augmentation prévisible du prix des combustibles va avoir pour effet de réduire le temps de retour de notre dépense par rapport aux estimations qui n'en tiennent pas compte. De même que ce retour sur investissement (ROI) pourraient encore diminuer si un transfert monétaire venant de cette fiscalité effrénée s'établissait en retour vers des aides aidant au financement des équipements produisant des ENR. La tendance est là, et au cœur de cet immense commerce de l'énergie, les principaux protagonistes, se donnent une connotation écologique. Ils pensent ainsi mieux  défendre leurs intérêts économiques en choisissant un partenaire « bio » ou « vert » de petite taille complémentaire à leur propre technique. 

Balendard

Oui vous avez raison. Bien que l'électricité́ d'origine nucléaire fournisse 75% de nos besoins actuels et  soit maintenant bien maitrisée on constate que les techniques de production basées sur la manipulation des chaines atomiques reste extrêmement difficiles à mettre en œuvre et demanderons à être plus sécurisé qu'elles ne le sont actuellement. L’énergie électrique nucléaire semble inquiète de son avenir écologique. C’est peut-être en raison de cette inquiétude qu’elle a choisi un valet de toute petite taille : le voltaïque. Sûr de ses bons services, elle le dédommage - pour l’instant - largement.

Les Lutins thermiques

Largement effectivement mais notre opinion est que cette rémunération va lentement diminuer et que petit à petit « Le soleil va faire de l'ombre au nucléaire »

 

Balendard

Les canoéistes que nous sommes se réjouissent de ces évolutions et s’inquiètent moins des nouvelles centrales nucléaires. Installées maintenant sur le littoral et non en bordure des fleuves, elles ne réchauffent plus la rivière et risquent moins de polluer les nappes phréatiques en liaison avec cette dernière. Reste les déchets radioactifs avez-vous des inquiétudes à ce sujet ?

Les Lutins thermiques

Nous sommes effectivement préoccupés par ce sujet mais nous avons confiance dans l’autorité de sureté nucléaire (ASN). Si la France souhaite continuer à développer cette technologie où elle excelle, notre opinion est qu’elle a tout intérêt à respecter leurs recommandations. Le risque nucléaire sera toujours là, mais il sera considérablement amoindri. Nous insistons sur le fait que cette forme d'énergie présente l'intérêt majeur de ne pas polluer l'atmosphère et d'être "pratiquement" renouvelable ou du moins en passe de le devenir. Les autres pays ont peut-être tort de nous considérer comme « la grenouille qui voudrait se faire plus grosse que le bœuf ». Nous avons besoin de cette forme d'énergie pour nous éclairer et surtout pour générer l’énergie mécanique dans de bonnes conditions économiques avec les moteurs électriques. Notre erreur a seulement été de vouloir se chauffer avec les radiateurs électriques. Mais si vous le voulez bien, revenons à cette connotation écologique que se donnent les différents protagonistes de l’énergie pour mieux  défendre leurs intérêts économiques.

Balendard

Oui, en vous écoutant je pensais au gaz. Il a beau se sentir fort et sûr de sa puissance en estimant se suffire largement à lui-même pendant quelques décennies, il sent bien qu’il

lui faudra aussi, pour son prestige, un partenaire de petite taille qui lui donne à lui aussi une connotation écologique sans trop nuire à ses intérêts. Il a à vrai dire un problème et il hésite. Parfois propane,  parfois butane, parfois gaz naturel (pour 90 % du méthane) c’est surtout sous cette dernière forme  qu’il cherche un partenaire. Mais lequel choisir, l’électricité d’origine nucléaire l’a pris de cours en choisissant le solaire voltaïque. Que choisir d’autre,  le bois ? Non, il faut qu'il surveille ses fréquentations, il sait que la déforestation conduit à éliminer moins bien le CO2 qu'il génère lui-même lors de sa combustion. Il a pensé un moment au  solaire thermique, qui a, on l’ignore trop souvent  - un rendement pas si mauvais que ça. …... Qu’en pensez-vous ?

Les Lutins thermiques

Notre opinion est que l’apport thermique que représente dans nos contrés les panneaux solaire est bien faible par rapport au besoin et que de plus le flux thermique solaire venant du ciel est à contresens par rapport au flux thermique venant d’une chaudière à gaz souvent disposée dans le sous-sol des immeubles alors que les émetteurs thermiques sont situés aux étages supérieurs. Pour ces raisons, notre opinion est donc que ce partenaire ne sera probablement pas le solaire thermique. Le gaz naturel pourrait aussi tenter de se mélanger au « biogaz » mais qui n’est pas conscient qu’il s’agit alors d’une duperie. Quant au pétrole, il restera selon nous célibataire. Inquiet, il commence à vieillir et à douter sérieusement de la pérennité de sa puissance. Il sait qu'il génère trop de gaz à effet de serre lors de sa combustion et il choisirait bien un partenaire, mais lequel ? Inadapté dans nos villes trop encombrées et trop polluées, il sent qu’il est déjà trop tard.

 

Livraison de fioul

dans les rues encombrées de nos villes

 

Balendard

Je suis tout à fait d’accord avec vous pour le pétrole et le fioul dans nos villes mais je souhaiterais formuler mon jugement au sujet de la pompe à chaleur. Sa capacité d’adaptation lui permettrait peut-être de cohabiter avec son voisin célibataire, mais elle ne l’aime pas. Propre par nature, elle considère qu’il est décidément trop sale. Par contre, cela ne la dérange pas d'être dépendante de l'électricité qu'elle considère avec respect pour sa propreté. Sûre de son avenir, elle a cependant un problème immédiat : Les habitations anciennes sont parfois difficiles à isoler après coup et lorsqu'il fait très froid, elle a parfois encore un peu de mal à délivrer l'énergie thermique en quantité suffisante  C’est pour cette seule raison qu’elle a, elle aussi, choisi un partenaire sur lequel elle puisse s’appuyer temporairement. Ne pensez-vous pas que ce partenaire pourrait être le gaz. Particulièrement  s’il s'agit d'un logement ancien en zone froide. Ne se suffit-elle pas déjà à elle-même en assurant la climatisation des locaux en zone plus chaude du type méditerranéen ?

Les Lutins thermiques

Votre vision de l’avenir à ce sujet est de notre point de vu la bonne. Il n’est plus question ici de connotation écologique mais d’une cohabitation intelligente entre le gaz et l’électricité. Collaboration qui assurera un avenir à plus long terme pour chacune de ces deux techniques. En diminuant le besoin en gaz elle prend en compte le risque que représente le gaz de schiste pour nos aquifères libres et captifs. 

gaz

L’apport thermique important du chauffage thermodynamique et la nécessité de ne pas procéder à l’exploitation du gaz de schiste sont deux facteurs complémentaires importants qui vont dans le bons sens.

 

 

Note prospective des Lutins

Fin 2011, soit quatre ans après la libéralisation de l'énergie, 2 français sur 3 ignorent encore qu'EDF et GDF Suez sont des entreprises rivales qui ont engagé une guerre commerciale.  Sur un total de 30 millions d'abonnés, 5 % ont par exemple quitté EDF au bénéfice de GDF Suez qui vend aussi de l'électricité. Pour compenser des pratiques commerciales douteuses ces abonnés peuvent depuis fin 2010 réintégrer EDF sans mesure de rétorsion. Pour l'instant, le consommateur n'a malheureusement pas bénéficié de cette mise en concurrence, les tarifs pratiqués par les différents opérateurs restant élevés avec des différences de prix généralement inférieurs à 10 %.

Les découvertes de gisement de pétrole au large de la Guyane et celles annoncées par Elixir Petroleum en septembre 2011 (qui aurait découvert de gigantesques réserves d'hydrocarbures non-conventionnels en Lorraine sur les quatre départements de la Meurthe-et-Moselle, de la Meuse, de la Moselle et des Vosges) vont-elles changer la donne? Peu probable, en effet cette annonce est accueillie avec scepticisme  par nos géologues qui estiment qu'il est peu probable que nous soyons restés jusqu'ici à ce point  ignorant de la nature de notre sous-sol.  Selon Elixir Petroleum, une part importante de ces réserves concerne les d'hydrocarbures non conventionnels qu'il semble impossible d'extraire actuellement sans recourir à la fracturation hydraulique, technique interdite en France à juste titre depuis juillet 2011. Malgré le scepticisme du ministère de l'énergie, il est probable que cette société va vouloir entreprendre de forer dans cette région dès 2012 suite à la découverte conjointe cette fois d'hydrocarbures conventionnels dans une réserve estimée à 2 milliards de barils de pétrole.  Le résultat ne peut être confirmé qu’après forage pour la raison que selon l'AFP,  en matière d'hydrocarbure, "le seul juge de paix, c'est le forage" Quoiqu'il en soit, avant de laisser la place aux ENR, le gaz pourrait bien devenir le fluide le plus utilisé en France dans les prochaines années

 

 

 

1) Le tableau ci-dessous donnent un ordre d'idée des quantités de gaz à effet de serre émises annuellement d’un immeuble ancien de 60 logements avec sa chaudière au fioul (avant isolation dans la première colonne avec une consommation annuelle 150 m3 de fioul) et après isolation pour un besoin énergétique après isolation de 1 M kWh au lieu de 1,5  dans les autres colonnes)

Fioul

Gaz

Gaz + solaire

Electricité

PAC + gaz

PAC seule

Géothermie

700 1)

242 2)

210 2)

180 2)

61 2)

180/COP 2)

Pas de GES

  1) exprimé en tonnes de GES          2) Après isolation  

 

L'Allemagne  figure parmi les pays européen produisant la plus grande part d'énergies renouvelables 

2) Energie thermique produite par la combustion des principaux combustibles:

 

Pouvoir Calorifique

 

Densité en kg/m3

Unités

Valeur (PCI)

Gazeux

Naturel

0.55

kWh/m³

9,5 à 12,8*

Propane

1.52

27

Butane

2.10

38

Liquide

Fioul

840

kWh/kg

12

Solide

Pellets

650

4,7


* Lors de sa combustion, le gaz naturel génère de la vapeur d'eau qui est évacuée par la cheminée. La chaleur latente d’évaporation contenue dans cette vapeur peut être récupérée dans les chaudières modernes à condensation. L’énergie ainsi récupérée représenterait environ 10 % de l'énergie totale disponible dans le gaz naturel. On parle de PCI (pouvoir calorifique inférieur) lorsque l’on ne récupère pas cette énergie et de PCS (pouvoir calorifique supérieur) lorsqu’on la récupère. Le gaz naturel est composé en grande partie de méthane (CH4). Le pouvoir calorifique du gaz naturel variant en France selon la source d’approvisionnement, les factures sont établis en /kWh. Le butane qui se liquéfie à basse température (-9°C), doit être stocké à l'intérieur de locaux chauffés. Le propane par contre peut être stocké en cuve à l'extérieur. 

 

< Quand le dernier arbre aura été coupé, quand la dernière rivière aura été empoisonnée,

quand le dernier poisson aura été attrapé,

seulement alors, l'homme de rendra compte que l'argent ne se mange pas >.