La thalassothermie ou la mer source d’énergie thermique

Une réalisation de chauffage thermodynamique réalisée en France à Marseille sous le nom Thassalia est l'opportunité d’attirer l’attention du lecteur sur le formidable potentiel thermique que représente l'eau de mer pour les cités portuaire ou les villes situées à proximité du littoral.

 

 

Paradoxalement la température de l’eau de mer va en décroissant au fur et à mesure que l'on s'enfonce sous la surface de l'océan alors qu'elle augmente lorsque l'on s'enfonce dans le sol.

(sensiblement +3°C par 100m

L’homme ne sait pas produire l’énergie électrique industriellement et surtout économiquement en utilisant la mer.

Il en est par contre tout autrement de l’énergie thermique.

 

La thalassathermie est une chaîne énergétique qui :

1)      réchauffe une boucle d’eau douce en hiver pour chauffer l’habitat en refroidissant l’eau de mer dans des échangeurs de température (figure de gauche)

2)      refroidi la même boucle d’eau douce en été pour climatiser l’habitat en réchauffant l’eau de mer (figure de droite)

 

Il va devenir urgent que le Grand Larousse en 5 volumes ajoute en urgence le mot aquathermie dans son recueil de mots ou que Bernard Pivot qui a été "mangé par les mots" prenne la décision de le faire. Ceci afin que nous puissions faire enfin la distinction entre la géothermie et l'aquathermie, entre le suffixe géo (sol) et le suffixe aqua (eau). Il va falloir aussi que nous prenions acte du fait que l'eau, qu’elle soit d’ailleurs salée ou douce est un formidable véhicule thermique autant sensible à l'interaction nucléaire des rayons solaires qu'à la chaleur souterraine de l'interaction nucléaire. 

Lorsque l’on sait que près de la moitié de la population mondiale vit à moins de 100 km du littoral on mesure combien le complexe de thalassothermie Thassalia près de Marseille annoncé sur internet à mi mot par l’Usine Nouvelle est important pour le devenir énergétique de l’homme. Ceci dans la mesure ou il assure le chauffage et la climatisation de l’habitat en récupérant grâce à ce complexe la chaleur thermique renouvelable contenue dans la mer pour assurer son confort. Et ceci en été comme en hiver dans la mesure où il refroidit l’eau de mer en hiver pour chauffer l’habitat et qu’il la réchauffe pour le climatiser en été. Cette importante réalisation de 35 millions d’€ a été financée avec l’aide de la région PACA et par Engie au travers des mécanismes financiers associées à la fiscalité de la taxe carbone contrôlés par l’Ademe.

On se demande pourquoi Engie, fournisseur de gaz a qualifié cette importante station de pompage associée à une grosse pompe à chaleur de « géothermie marine ». Ceci alors que tous les transferts d’énergie thermique venant de la mer vers les bâtiments ou y retournant sont assurés par de l’eau salé côté mer et par de l’eau douce côté bâtiments. On ne peut que regretter à nouveau cette regrettable confusion des genres. L’appellation « aquathermie marine » aurait pour cette raison été certainement mieux adaptée. Quoiqu’il en soit, ce qui compte, c’est le résultat escompté de cette réalisation de 19 MW et ceci qu’elle soit en mode chauffage où en mode climatisation. Les deux figures ci-dessous donnent une idée du fonctionnement dans son principe de base. Elles permettent de comprendre pourquoi les deux ∆T de quelque 7°C sont sensiblement équivalents. La première tranche vient d’être inaugurée en octobre 2016. Les quelque 500 000 logements et bureaux qui pourront être chauffés ou climatisés à la fin de ce projet vont bénéficier d’un rabais de leurs charges de chauffage et climatisation par le fait que 70% de l’énergie thermique nécessaire est prélevée dans la mer. Cela correspondant sensiblement à un COP de 3,3 avec un besoin en énergie primaire et une émission de gaz à effet de serre diminué dans les mêmes proportions.

 

Les deux modes de marche distinctes régissent le fonctionnement de l’ensemble :

- L'hiver mode chauffage  (On refroidi l’eau de mer)

Pompage de l’eau de mer à faible profondeur  (– 5 m)  à une température voisine de 14°C  avec rejet à environ 7°C à quelque -1000m

∆T environ 7°C  (l'eau de mer gèle à -2°C)

Figure 1  

COP théorique = Tc /(Tc – Tf) = (273 + 80)/(80 – 14) = 5,35.

En pratique la température de la source chaude limitée à 60°C a permis d’obtenir des COP réels voisin de 4 soit 1 kWh électrique consommé pour 4 kWh thermique délivrée pour le chauffage de l’habitat

- L'été mode climatisation  (On réchauffe l’eau de mer)
Pompage de l’eau de mer à - 1000m à une température voisine de 7°C  avec rejet à environ 14°C à 5m de la surface

∆T à nouveau environ 7°C

Figure 2

Pour compréhension de la valve faisant la commutation voir les principaux composants d’une PAC eau eau

Alors que la température de l’eau de mer est constante à grande profondeur et proche de 5° C en Méditerranée en dessous de 1000 m, elle évolue plus ou moins en surface selon la saison.

A une profondeur de 5 m, elle varie par exemple entre 14 et 22 °C selon que l’on est en hiver ou en été.

Lorsque Thassalia fonctionne en hiver en pompe à chaleur conventionnelle en chauffant les bâtiments, la température de la source froide est donc voisine de 14° soit sensiblement 4 °C au-dessus de la température de la source froide d’une PAC sur nappe conventionnelle améliorant le COP de la pompe à chaleur par rapport à une PAC sur nappe conventionnelle. Par le fait que les deux ∆T soient sensiblement les mêmes, la puissance en mode chaud (chauffage) est équivalentes à celle  en mode froid (climatisation). A noter que cette capacité de pouvoir disposer autant d'énergie pour la climatisation que pour le chauffage correspond bien au besoin de l'homme dans une région  où il fait plutôt chaud l'été (40°C ) et pas très froid l'hiver (0°C). En effet la différence hiver-été entre la température extérieure et avec une  température de confort de 20°C est la même au signe près - 20°C et + 20°C. Cela signifie que les débits d'eau de mer circulant dans l'échangeur de température assurant la fonction  évaporateur en mode chauffage et condenseur en mode chauffage sont les mêmes ce qui simplifie le circuit et sa compréhension. Les débits d'eau sont loin d'être négligeables puisqu'en chauffant 500 000 logements sur la base d'une déperdition de 50 kWh par m² habitable conforme à la RT2012 la déperdition annuelle prévisible est de 250 000 000 kWh.

 

Quelques calculs pour situer approximativement le complexe :

Sur la base d'une puissance de 19 MW (19 000 kW)  le débit d'eau de mer requis dans l'échangeur à contre-courant constituant l'évaporateur est égal à

Q = 19 000/(1,16 x 6)     soit Q =  2300 m3/h
Soit à la vitesse de 1m/s compatible avec ce genre d'équipement une tuyauterie de 0,75 m2 ayant un diamètre intérieur proche de 1m

Avec une viscosité cinématique de l'eau à 7°C voisine de 1,3 centistoke  Voir l’eau véhicule thermique  

Et les pertes de charges en ligne du logiciel OCES

 

 

La mer lieu de stockage de l’énergie électrique ?