Descente de la Loire de Cosne à Paimboeuf
Du 4 au 19
avril 2009
Pour
mon anniversaire (70 ans) je voulais faire un voyage seule...
j'avais bien pensé à une semaine en thalasso ou encore marcher jusqu'à Saint
Jacques de Compostelle mais cela ne m'emballait pas plus que ça. Préparatifs |
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En
septembre dernier alors que j'admirais une fois de plus le coucher de Soleil
sur la Loire j'ai dit à Alain, sans trop vraiment penser que j'aIlais le faire: «et si je
descendais la Loire jusqu'à la mer? ... Il
me répond: «pourquoi pas! »... Prise à mon propre
piège j'ai répondu: « c'est OK, je le fais... » En
février, nous sommes partis en reconnaissance jusqu'à Saint Brévin . |
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Samedi
4 avril 2009 Le grand jour est arrivé et je pars, non pas
de Beaulieu sur Loire, mais de Cosne légèrement en aval de Sancerre avec les
amis de mon club de Canoë-Kayak qui ont décidé de m'accompagner jusqu'à Ousson . Le départ |
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Après
25 km parcourus ensemble, je suis seule et l'émotion est forte lorsque nous
nous quittons ...Dans mon bateau je transporte tente, couchage, nourriture,
boisson, pharmacie etc... enfin tout ce qui me
paraît nécessaire pour être en totale autonomie car il n'est pas question que
je m'arrête en cours de route pour faire des achats.. .Après
avoir parcouru environ 42 km, je m'arrête juste avant le barrage de Dampierre |
Dimanche 5
avril
Je suis
réveillée à 6 heures après une première nuit assez agitée. Le sol... c'est dur !...Tout est rangé et installé dans le bateau il ne me
reste que la tente à plier.. Mais c'est catastrophique.
Je n'y
arrive pas, pourtant je la tourne dans tous les sens, me concentre, essaie de
comprendre les petits croquis explicatifs mais ce que j'ai mis 5 minutes à
monter, je mets plus d'une heure à plier.. Enfin
prête, je reprends ma navigation jusqu'à mon prochain camp monté à environ 1 km
avant Jargeau. La soirée est ensoleillée et j'en profite pour recharger la
batterie de mon téléphone grâce au panneau solaire que j'ai eu grand soin
d'emporter.
Lundi 6 avril .
Je me
réveille par un épais brouillard qui heureusement ne dure pas. Le moral est bon
car, si hier j'ai mis 4 heures avant d'embarquer, aujourd'hui à 9 h.30 je suis
prête. Malheureusement, alors que je suis dans mon bateau, je m'aperçois que
j'ai laissé mes lunettes de vue dans une petite poche de ma tente. Cette «
foutue » tente qui me donne encore tant de difficulté. Après un moment de
découragement je me décide à la déplier et constate avec un immense soulagement
que mes lunettes sont bien là, intactes... il me faut maintenant replier et
remettre ma tente dans son sac une deuxième fois. Bien entendu, je ne serai pas
sur l'eau plus tôt qu'hier. Toute la journée, je suis freinée par un fort vent
de face. Heureusement le passage du rapide sous un des ponts d'Orléans, le «
coucou » échangé avec un kayakiste qui s'y entraîne et la succession des petits
courants sympathiques vont agrémenter cette journée. Vers 18h. 30, je monte mon
troisième camp sur une île à proximité de Saint Ay .
En soirée, je subis un orage qui me terrifie ... d'autant que je suis seule et
qu'il fait nuit. Tout prend des proportions incroyables et ce n'est pas le coup
de téléphone que je donne à Alain vers minuit qui me rassure...Enfm, le calme revient et une douce pluie me berce...
Mardi 7
Avril :
Après une
matinée de récupération je subis: l'indispensable portage du barrage de
Saint-Laurent des Eaux. Cela ne devait pourtant pas poser de gros problèmes
Alain m'avait préparé un chariot, bien expliqué la technique mais le bateau est
lourd, le chargement aussi et moi pas très (45 kg toute mouillée) je me suis
tee, une fois de plus complètement stupide... C'était pourtant si facile
d'après lui. Le côté positif de cette journée est que j'aie pu recharger mon
téléphone grâce aux quelques apparitions du soleil. J'accoste sur une toute
petite île avant Muides sur Loire ... que du sable
Mercredi
8 avril: Je
quitte avec regret ma petite île de Robinson-Crusoé. Avec un fort vent de
face, une journée de pluie et de froid commence. A l'entrée de Blois, je croise
2 kayakistes : une femme accompagnée d'un petit garçon ... |
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Après
quelques échanges nous constatons que nous nous sommes déjà rencontrées. Il
s'agit de Christiane Amiot. Nous lui avons fourni quelques bateaux
lorsqu'elle était en équipe de France. A hauteur de Chouzy
sur Cissé, je fais une première tentative pour monter ma tente mais elle ne
tient pas dans le petit espace de verdure choisi et je dois donc la replier
... je repars et trouve enfin un coin convenable. J'ai mal partout
et la nuit est difficile.. |
Jeudi 9
avril :
Réveillée à
2 h du matin, j'ai toujours froid, je n'ose sortir les bras du duvet. Je
somnole jusqu'au matin. Enfin le soleil et j'en profite pour recharger mon
téléphone. Ma navigation est toujours gênée par un fort vent de S/O Je m'arrête
sur une petite île vers Montlouis sur Loire. Le sable est très propre .Alain
est venu faire un passage en ULM. Super ! je me sens moins seule.
Vendredi 10 avril : Réveillée
à 5 heures je ne peux me rendormir. Après un petit café, je commence le
rangement. Je ne souffre plus.. .Avant Tours, la Loire
est sale et pas ou peu d'oiseaux. Il pleut...A Tours je récupère une bouteille
de gaz que le fils d'une amie a achetée pour moi. Je crains d'être en rupture
de stock avant la fm de ma balade car tous les soirs,
j'utilise mon réchaud pour sécher une partie de mes vêtements. Vers 15h 30, je
suis déjà à la recherche d'un emplacement. Je m'arrête après Luyne à environ 6 km avant le confluent du Cher. Alors que
je m'installe, je vois passer un canoë ouvert genre Riviera. C'est un couple,
ils font une descente de 3 jours et doivent s'arrêter à Saumur. Enfin je peux
me reposer... Sous ma tente, malgré la fatigue, le froid, l'humidité et mes
douleurs, je ne regrette pas d'être là....
samedi 11
avril,
Il pleut
toujours ce qui n'est guère encourageant. La journée s'étire monotone. J'arrive
à la Centrale de Chinon qui ne pose pas de problème car il n'y a pas de
barrage.
Je décide de
m'arrêter mais je mets 2 heures avant de trouver un endroit correct 500 m en
amont du confluent de la Vienne. Le moral est bien bas, il pleut depuis ce
matin, tout est vtrempé, moi également et afin de me
remonter je bois deux petits verres de rouge. La tête tourne un peu mais la
sensation est agréable.
Dimanche 12
avril:
Toujours la
pluie et à Montsoreau, je décide de m'acheter une fourrure polaire. J'en trouve
une mais je nage dedans: pas grave, Alain en héritera... en attendant, elle me
tiendra chaud... Au fur et à mesure de la descente, les berges s'écartent de
plus en plus et pour aller d'une rive à l'autre il faut parcourir parfois 1 km.. .Le Cher et la Vienne sont venus gonfler les eaux de la
Loire. Je mets décidemment beaucoup de temps à trouver un camp qui puisse me
convenir: Il ne faut pas qu'il m'oblige à porter mes bidons trop haut et trop
loin ; de plus, il faut qu'il soit isolé de façon à ce que je ne sois pas
remarquée. J'ai parfois un peu la frousse... Ce soir, je m'endors quelques
kilomètres après « les Rosiers »
Lundi 13
avril :
J'ai décidé,
aujourd'hui d'avancer un peu. J'ai envie de retrouver un bon lit. Les quelques
apparitions du soleil me permettront de recharger mon téléphone... J'arrive au
magnifique village « Ponts de Cé » . Je prends le bras
de droite. L’île aux chevaux est bien avenante mais trop tôt pour m'arrêter. Je
continue.... Avant Savennières, je prends le bras de gauche car les deux
kayakistes que je croise me déconseillent celui de droite à cause des deux
rapides situés l'un en début et l'autre à la sortie du bras Vous risquez
d'avoir des problèmes me disent-ils surtout avec votre gros bateau. ... je suis
leurs conseils... Je m'arrête au début de l'Ile de la Tancré
après un parcours depuis les Ponts de Cé
très agréable et réconfortant.
Mardi 14
avril:
Descente
toujours agréable jusqu'à Chalonne. J'ai envie de
tout photographier. C'est beau à en pleurer... plus beau que sur des tableaux
... Je pense à Claire. Si elle était là, elle ferait danser ses pinceaux... Je
dois maintenant planter ma tente et une fois de plus, je ne trouve pas
rapidement. Beaucoup de pêcheurs, de promeneurs sur les berges. Je suis
inquiète. Je suis sur l'île Briand et je vois des lampes de poche partout... Ca
y est, je vais être attaquée... J'apprendrai plus tard, qu'il s'agissait
probablement de braconniers qui pêchaient la civelle. C'est fou comme dans le
noir et seule tout prend des proportions irraisonnables Cela, aujourd'hui, me
fait bien rire....
Mercredi 15
avril :
Cette
journée a été particulièrement marquée par de fortes émotions que je résume brièvement
: Pour commencer, avant Nantes, alors que je cherche un endroit pour dormir,
je suis « collée » dans la vase. et je m'en sors en
rampant.. Inutile de vous dire dans quel état je me retrouve, aussi bien
physiquement (de la vase de la tête au pied) que moralement. j'ai eu la peur de ma vie.. |
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Il
pleut toujours, pas un rat dehors. Pas d'autre solution que de continuer. Je
rejoins mon bateau. Le ciel est bien sombre, il faut que je m'arrête au plus
vite et 100m avant le pont qui relie Rézé à Nantes,
je remarque une petite plateforme en herbe au pied d'une maison d’habitation.
Je ne fais pas la même bêtise de tout à l'heure et je grimpe sur une digue en
pierre ça glisse mais pas question de remettre un orteil sur la vase. |
Bon, c'est correct
mais j'ai juste la place pour monter la tente. Il est 20 h 30 je commence à
préparer mon repas soudain, j'entends un bruit anormal de vagues suite au
passage d'un gros bateau à moteur. Je sors le nez de la tente et branle-bas de
combat, l'eau est proche. A ce moment, j'entends un bruit de porte, je grimpe
les quelques barreaux d'une petite échelle placée sur le muret de la maison et
j'appelle le monsieur qui ressort d'un bâtiment les bras chargés de bûches. - «
Hé, monsieur, pouvez-vous me dire jusqu'où l'eau monte ? » - le Monsieur se
retourne, il est interloqué. -« Mais qu'est-ce que vous faites là ? » - « Je
campe sous votre petit muret, venez voir.., et j'ai mon kayak là-bas...
regardez... » - Il vient voir et me dit : - « vite, il ne faut pas rester là,
je ne connais pas le coefficient de la marée mais ça monte des fois
jusque-là... » et il me montre la limite. Effectivement, je risque de me
retrouver sous l'eau... J'ai battu, ce soir-là tous les records de vitesse pour
démonter mon camp. Quelques instants après, le monsieur revient et me propose
son jardin pour m'installer .Je ne me le fais pas dire deux fois... Je ne peux
vous parler du paysage car aujourd'hui, je n'ai rien vu. Pluie, pluie, parfois
torrentielle.
Jeudi
16 avril: Après
une nuit très calme et paisible, au petit matin, le ciel est totalement
dégagé. Bientôt je vois le soleil. J’installe mon panneau solaire. |
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J'ai
retrouvé le moral, je suis entourée de merveilleuses fleurs et je fais des
photos. Je prends tout mon temps et suis sur l'eau vers midi. C'est décidé
aujourd'hui, je n'irai pas plus loin que la Martinière. J'ai rendez-vous avec
Alain et Matis Renaud qui doit avec sa pirogue, m'accompagner pour la
dernière étape. |
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Vendredi
17 avril : Nous
partons trop tard et arrivés à Paimboeuf, nous ne pourrons aller plus loin
car nous subissons, Matis et moi, un fort vent de face ainsi que le début de
la marée montante. |
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Ce
fils, petit fils et neveu de champions olympiques avait compris, bien avant
moi, que nous ne pourrions effectuer les 7 km qui nous restaient pour arriver
à Saint Brevin. France Petit, notre Présidente, nous
attend à Pornic et nous terminons la soirée au restaurant. Philippe et Matis
Renaud sont également présents. |
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L'aventure
terminée, je ressens un grand vide.., et peu à peu je
la digère.. .Je ne suis pas déçue, bien au contraire j'aimerais recommencer...
Au départ, je craignais de m'ennuyer et jamais cela n'a été le cas, J'avais
peur également de ne pas tenir le coup mais malgré quelques périodes de doute,
je savais que j'irais jusqu'à la mer, que seul un gros problème de santé ou
accident pourrait mettre fin à mes vacances.
J’en reviens
avec 2 ou 3 kg en moins mais tellement
émerveillée. Ma santé est excellente, mes douleurs ont pratiquement disparu. Je
suis en pleine forme, avec en tête une envie très forte de recommencer... Bien
sûr je ne suis plus très jeune et n'ai plus trop de muscle mais sans vouloir
faire preuve de fausse modestie, je ne pense vraiment pas avoir réalisé un
exploit. Je suis presque plus fatiguée quand je reviens d'un week-end de garde
de l'un de mes plus jeunes petits enfants, un gros bébé qui doit peser plus
lourd qu'un des containers étanches embarqués dans ma balade...
A chacun son
aventure ... elle est à portée de Tous.
Un grand
merci à tous ceux qui m'ont encouragée...
Claudette
Feuillette (Ancienne championne du Monde de CK)
Note concernant la
sécurité
Bonjour,
Je ne me souviens pas d'avoir eu un problème particulier à Nantes. Le seul
portage (Sur berge de droite) que j'ai dû effectuer est au barrage de Saint Laurent Nouans ce qui est
absolument indispensable car il y a un très fort rappel.
A Orléans, je suis passée dans le bras de droite mais
sous le pont, plutôt à gauche. Un slalom est installé et ça bouge un peu. Il
faut peut-être se renseigner au club de canoë d'Orléans ; quelqu'un pourra
donner des indications et éventuellement les modifications. A Tours, je suis
descendue de bateau pour effectuer une reconnaissance et suis passée rive
gauche assez près de la berge. Je pense que lorsqu'un doute existe, il faut
effectuer une reconnaissance car le niveau de la Loire peut varier
et modifier une passe. Il existe un guide de la Loire
"LA LOIRE VUE DU FLEUVE de Jean François Souchard qu'il
faut cependant interpréter toujours en fonction du niveau lors de votre
descente.
Je vous souhaite d'avoir autant de plaisir que j' ai
eu à effectuer la descente de ce fleuve magique.
bien
cordialement
Claudette