Plaidoyer pour la rivière
Au moment où l'on vient d'ajouter à notre
Constitution le premier article de la charte de l'environnement1),
les deux articles ''pour une eau propre et libre
prennent tout leur sens.
Ceux qui considèrent les rivières comme un égout bien
pratique, voir un dépotoir, ne mérite pas notre considération et feraient bien
de se méfier. De telles pratiques ne sont pas tolérables pour les populations
situées en aval.
L'ancienneté
des rivières devrait pourtant nous imposer un certain respect. Les hommes ne
les ont-t-ils pas trouvées là où elles coulent aujourd’hui ?
Du
temps des Gaulois, la pêche était libre et nourrissait l’homme autant que la
cueillette. Les poissons, plus faciles à prendre que le gibier, grouillaient
dans les cours d’eau. Plus tard, elles ont permis le transport du bois par
flottage et à ce titre, ont été davantage un chemin qu’un obstacle. Pour les
identifier, les hommes leur ont alors donné un nom à l’étymologie et à
l’hydronymie* incertaines, qui, par voie de conséquence est souvent contesté.
Ce nom, la
plupart du temps en latin, est
mentionné dans le guide des rivières de France lorsqu’il a été
authentifié. Les rivières ont ensuite permis l'identification des villes et des
communes. Sans elles, comment ferions-nous pour distinguer tous les
"Châtillon" ? Elles ont aidées
également au découpage administratif. Les départements français ne portent-ils
pas pour la plupart le nom d’une rivière ? Pourtant la rivière a été mal
récompensée par l’homme. Objet de multiples agressions, elle perd jour après
jour sa substance. Elle a pratiquement cessé de nous nourrir. Elle continuera
d'être un réservoir pour l'irrigation des cultures, mais en raison du manque
d'eau, cette irrigation a commencé insidieusement à voler l’eau des rivières et
la tristesse m’envahit quand je pense aux tunnels de captation qui détournent
le lit des rivières. Même justifiées par des soucis de production ou de régulation,
ces modifications de nos bassins hydrologiques entraînent souvent des désordres
écologiques importants. Pour réduire le prix du KWh et améliorer notre confort
quotidien, l’EDF a parfois signé l’arrêt de mort de nos plus belles rivières. L’eau
est transportée par une conduite forcée d’une retenue jusqu’à la retenue
suivante, en agitant au passage quelques turbines et en transformant la rivière
en escalier. Ceci en ne laissant dans son lit naturel qu'un débit insuffisant
pudiquement appelé "débit réservé". Réservé pour qui ?, on se le
demande, peut-être pour quelques grenouilles assoiffées?
La
dernière menace, celle de la pollution est sans doute la pire. La pollution
microbienne provoquée par les rejets humains ou animaux régresse petit à petit,
par contre, en raison de la pollution chimique, certaines rivières semblent
définitivement perdues. Sur l’Agout et ses affluents le Thoré et le Dadou,
l’eau était tellement polluée en 1990 que la simple circulation en barque y
était considérée comme dangereuse. La pollution massive entraîne parfois la
mort des poissons par milliers et souvent le pêcheur n’ose plus manger le fruit
de sa pêche. Celle-ci est
pourtant une activité lourdement taxée ou le principe du ‘’pollueur-payeur’’ n’est pas respecté.
Qu’en est-il à ce jour ? Un livre à paraître courant 2009 '' La rivière et l'énergie'' apporte un début de réponse à cette question ou à défaut suggère des solutions et des éléments de réponse pour progresser. Les rivières ont un genre et une histoire. Certes, elles ont parfois mauvais caractère, mais ce n'est pas une raison pour les abandonner complètement.
Des acteurs
célèbres tels que
Roberto Epple président de SOS
Loire vivante ont heureusement montré qu'un grand fleuve peut revivre en
quelques années. De nouveaux acteurs
font aussi leur apparition dans la défense du patrimoine de l'eau vive, par
exemple avec les
syndicats locaux d'aménagement de la rivière. ou des députés motivés par l'importance de l'enjeu.
La rivière malade ne demande qu’à guérir,
soignons-la, elle nous le rendra.
Est-ce les décisions de nos responsables politiques qui permettront de la soigner? à vous de juger.
1) Chacun a le droit de vivre dans un environnement
équilibré et favorable à sa santé
* Branche de
l’onomastique qui étudie l’origine du nom des cours d’eaux en tenant compte de
l’environnement historique, géographique et social.
Voir site : http://crehangec.free.fr/rivac.htm#a